Cas Public raconte l'histoire de Cai Glover
4 mars 2017
Article à propos du spectacle 9 de Cas Public et Kopergietery présenté à la Cinquième Salle de la Place des Arts.
- Oliver Koomsatira
La compagnie de danse Cas Public et la maison de création Kopergietery présenteront le spectacle 9 à la Cinquième Salle de la Place des Arts du 9 au 11 mars. Mis en scène par la chorégraphe Hélène Blackburn, l’oeuvre s’inspire du danseur Cai Glover sur la Neuvième Symphonie de Beethoven. La pièce sera également présentée en France suite à son passage à Montréal. La chorégraphe nous en dit plus sur le processus de création.
Premièrement, elle nous explique la différente approche qu'elle a eu avec 9 : « Pour cette œuvre, j'ai travaillé différemment notamment en allongeant le calendrier de répétition en faisant le choix de créer avec un ou deux danseurs à la fois. Normalement, je travaille très rapidement et avec tout le groupe. Cela m'a permis de définir un langage propre à chacun des danseurs avant de commencer le travail de groupe, cette approche individuelle m'a permis de travailler plus soigneusement et plus délicatement à l'élaboration du vocabulaire chorégraphique. Nous avons également fait le choix d'introduire plusieurs éléments gestuels venant du langage des sourds, chose que nous avions déjà fait dans un projet précédent mais cette fois avec beaucoup plus de liberté. Ce travail minutieux des bras, des mains et parfois même du visage me semble ajouter beaucoup à la pièce. J'ai parfois l'impression que nous dansons de véritables métaphores. Cet ajout a considérablement enrichi notre vocabulaire gestuel. Suite à ce travail de défrichage, nous avons abordé la création en groupe et la chorégraphie s'est construite très rapidement, nous laissant ainsi beaucoup de temps pour peaufiner tous les aspects du spectacle; sa dramaturgie, ses éclairages, ses costumes, son décors et même les films qui l'accompagnent. »
Comme le spectacle s’inspire de Cai Glover et que celui-ci est particulièrement unique, Hélène Blackburn nous explique ce qui l’a poussé à vouloir créer cette oeuvre en son honneur : « Il y a plusieurs réponses à cette question. J'ai toujours plusieurs projets qui flottent dans ma tête avant de prendre une forme définitive propice à la création. Depuis longtemps, plus de 20 ans probablement, je voulais faire quelque chose sur la musique de Beethoven mais ce n'est pas une matière évidente pour la danse car ses œuvres les plus connues sont sous forme symphonique et commandent beaucoup de puissance dans tous les sens. Au fil du travail avec Cai, je me suis rendue compte que pour une majorité de spectateurs, son problème auditif demeurait invisible. Les contraintes que cela posent étant essentiellement personnelles et n'étaient guère visibles pour la majorité des spectateurs. Il en est de même pour presque toutes les blessures ou les limites des danseurs. Je me suis donc intéressée d'abord à cette matière invisible en me demandant si c'était intéressant de la rendre visible d'une quelconque façon... Et c'est à ce moment que Beethoven est réapparu. C'était le compositeur idéal pour ce genre de projet, lui qui a écrit ses œuvres les plus importantes en étant partiellement ou encore complètement sourd à la fin de sa vie. »
Premièrement, elle nous explique la différente approche qu'elle a eu avec 9 : « Pour cette œuvre, j'ai travaillé différemment notamment en allongeant le calendrier de répétition en faisant le choix de créer avec un ou deux danseurs à la fois. Normalement, je travaille très rapidement et avec tout le groupe. Cela m'a permis de définir un langage propre à chacun des danseurs avant de commencer le travail de groupe, cette approche individuelle m'a permis de travailler plus soigneusement et plus délicatement à l'élaboration du vocabulaire chorégraphique. Nous avons également fait le choix d'introduire plusieurs éléments gestuels venant du langage des sourds, chose que nous avions déjà fait dans un projet précédent mais cette fois avec beaucoup plus de liberté. Ce travail minutieux des bras, des mains et parfois même du visage me semble ajouter beaucoup à la pièce. J'ai parfois l'impression que nous dansons de véritables métaphores. Cet ajout a considérablement enrichi notre vocabulaire gestuel. Suite à ce travail de défrichage, nous avons abordé la création en groupe et la chorégraphie s'est construite très rapidement, nous laissant ainsi beaucoup de temps pour peaufiner tous les aspects du spectacle; sa dramaturgie, ses éclairages, ses costumes, son décors et même les films qui l'accompagnent. »
Comme le spectacle s’inspire de Cai Glover et que celui-ci est particulièrement unique, Hélène Blackburn nous explique ce qui l’a poussé à vouloir créer cette oeuvre en son honneur : « Il y a plusieurs réponses à cette question. J'ai toujours plusieurs projets qui flottent dans ma tête avant de prendre une forme définitive propice à la création. Depuis longtemps, plus de 20 ans probablement, je voulais faire quelque chose sur la musique de Beethoven mais ce n'est pas une matière évidente pour la danse car ses œuvres les plus connues sont sous forme symphonique et commandent beaucoup de puissance dans tous les sens. Au fil du travail avec Cai, je me suis rendue compte que pour une majorité de spectateurs, son problème auditif demeurait invisible. Les contraintes que cela posent étant essentiellement personnelles et n'étaient guère visibles pour la majorité des spectateurs. Il en est de même pour presque toutes les blessures ou les limites des danseurs. Je me suis donc intéressée d'abord à cette matière invisible en me demandant si c'était intéressant de la rendre visible d'une quelconque façon... Et c'est à ce moment que Beethoven est réapparu. C'était le compositeur idéal pour ce genre de projet, lui qui a écrit ses œuvres les plus importantes en étant partiellement ou encore complètement sourd à la fin de sa vie. »
En effet, beaucoup de danseuses et danseurs subissent une ou plusieurs blessures à cause de leur profession. La demande physique est énorme et le rythme de travail souvent effréné. On ne peut qu’imaginer le poids additionnel à porter lorsqu’on a d’autres obstacles physiques. « En avançant dans les prémices de ce projet, la situation de Cai et le parallèle entre Beethoven s'est naturellement imposé. Au début de cette création, nous avions convenu Cai et moi qu'on essaierait de travailler sans ses appareils auditifs. Après une semaine de travail, j'ai réalisé que cette contrainte était plus ou moins valable dans le sens où Cai prenait toute la charge sur ses épaules et qu'il n'y avait que peu ou pas de conséquences de mon côté. On a alors convenu de travailler avec ses appareils. Ce n'est qu'à la toute fin du processus, soit la veille de la première, suite à quelques entrevues que nous avions données ensemble et qui questionnaient directement cet aspect de notre démarche, que Cai m'a demandé s'il pouvait essayer de danser le spectacle sans son aide auditive. J'ai accepté dans la mesure où j'ai toujours cru qu'il dansait aussi bien avec que sans ses appareils. L'expérience a été tellement concluante pour Cai qu'il a décidé de poursuivre ainsi. »
Souvent, dans le milieu de la danse, les chorégraphes recherchent la perfection : des corps en forme, musclés, souples, une technique d’élite, des beaux visages, une présence magnétique, etc. Bref, il est donc intéressant que l’on puisse voir un peu de diversité dans les rangs de compagnies montréalaises. On a qu’à penser à Jacques Poulin-Denis, Luca Patuelli (Lazylegz) ou Roya the destRoya qui sont parmi les interprètes les plus inspirants à voir danser malgré leur différence. Leur danse n’est pas affaiblie de quelconque façon. À l’inverse, elle est enrichie. Comme Hélène Blackburn le mentionne dans le cas de Cai Glover, « l’intérêt de ce processus, c'est qu'on a dû se poser de multiples questions sur cette différence si fondamentale et pourtant si subtile car cela me semble avoir peu d'impact direct sur la qualité de sa danse, si ce n'est de le rendre encore plus sensible à son environnement. » Ce point de départ les a ensuite amené à aborder plus largement la question de la perception. : « Je crois que l'esprit humain imagine davantage le réel qu'il ne l'objective. Chacun percevant sa réalité. Dans ce contexte, la normalité devient un concept bien relatif! Finalement, je pense que ce spectacle est un bel éloge à la différence, en ces temps où on sent un repli identitaire dans de nombreux pays. La peur de ce qui nous semble étranger voire différent cède trop facilement sur le plaisir de découvrir de nouvelles choses et de rencontrer l’autre. »
Souvent, dans le milieu de la danse, les chorégraphes recherchent la perfection : des corps en forme, musclés, souples, une technique d’élite, des beaux visages, une présence magnétique, etc. Bref, il est donc intéressant que l’on puisse voir un peu de diversité dans les rangs de compagnies montréalaises. On a qu’à penser à Jacques Poulin-Denis, Luca Patuelli (Lazylegz) ou Roya the destRoya qui sont parmi les interprètes les plus inspirants à voir danser malgré leur différence. Leur danse n’est pas affaiblie de quelconque façon. À l’inverse, elle est enrichie. Comme Hélène Blackburn le mentionne dans le cas de Cai Glover, « l’intérêt de ce processus, c'est qu'on a dû se poser de multiples questions sur cette différence si fondamentale et pourtant si subtile car cela me semble avoir peu d'impact direct sur la qualité de sa danse, si ce n'est de le rendre encore plus sensible à son environnement. » Ce point de départ les a ensuite amené à aborder plus largement la question de la perception. : « Je crois que l'esprit humain imagine davantage le réel qu'il ne l'objective. Chacun percevant sa réalité. Dans ce contexte, la normalité devient un concept bien relatif! Finalement, je pense que ce spectacle est un bel éloge à la différence, en ces temps où on sent un repli identitaire dans de nombreux pays. La peur de ce qui nous semble étranger voire différent cède trop facilement sur le plaisir de découvrir de nouvelles choses et de rencontrer l’autre. »
Évidemment, chaque interprète est singulier et les meilleurs leaders et pédagogues savent comment travailler différemment avec chaque individu au lieu d’imposer une seule façon de faire. De cette manière, la chorégraphe a su faire ressortir les meilleures qualités de son interprète en dépit de sa différence. Ceci dit, elle ne prétend pas lui faire de charité, il était tout simplement le meilleur danseur à ses yeux : « Je dis toujours que j'ai engagé Cai non pas à cause de son handicap mais bien pour ses compétences. C'est un danseur extraordinaire, le meilleur venu auditionner au moment où nous avions besoin de quelqu'un. C'est donc un danseur de talent, sa différence commande des ajustements mineurs comme de s'assurer qu'il a bien compris lorsque nous travaillons dans un grand espace mais ces ajustements ne sont ni pire, ni moindre qu'un autre danseur. Chaque personne a ses forces ou ses faiblesses. Je ne crois pas que Cai me force à travailler différemment, il faut savoir s'ajuster à chaque personnalité. » De plus, une profession artistique n'implique pas que du talent, il y a aussi la chimie humaine qui entre en ligne de compte. De ce côté, la chorégraphe se sens aussi très choyée : « La particularité de Cai, c'est que sa différence nous a offert un point de contact unique qui a favorisé l'échange et la discussion entre nous. Au fil du temps, il est devenu une des personnes avec qui j'ai le plus de plaisir à collaborer. Sa très grande sensibilité et son immense sens de l'observation font qu'il est de ceux qui savent toujours comment je me sens en studio. Il est une des rares personnes qui peut deviner mes humeurs avant même que j'en prenne conscience parfois... au fil du temps. Il est devenu un véritable complice qui m'accompagne dans toutes mes aventures de création même mes commandes d'œuvres à l'extérieur de la compagnie. »
Si vous suivez l’actualité, l’année 2016 a dû parfois vous démoraliser. Notre planète et la race humaine semblent être très malades. Pour Hélène Blackburn, ce n’est pas une raison pour se laisser abattre. Elle décide plutôt de célébrer ce qu’il y a de beau sur terre : « 9 est un spectacle plein d'énergie et d'espoir. La 9ieme de Beethoven se concluant sur l'Hymne à la Joie, je pense qu'on peut difficilement résister à cet appel au dépassement et au bonheur. C'est une œuvre intense, au moins aussi intense et passionnée que la musique de Beethoven. Je crois qu'en ces temps troublent où les mauvaises nouvelles semblent trop souvent obscurcir l'horizon, le choix de travailler sur un hommage à nos différences est quelque chose qui fait un bien infini autant pour nous que pour les spectateurs. »
Pour conclure, la fondatrice de Cas Public nous partage ce qui suivra pour sa compagnie suite à la série de représentations de 9 : « Après la PDA, nous retournons en Europe pour deux blocs de tournée importants qui vont nous amener en France, en Espagne et au Royaume-Uni. Nous allons danser trois œuvres du répertoire dont "9". Dans les faits, nous serons en tournée jusqu'au début du mois de juin avec un petit retour de 2 semaines à Montréal en avril. "9" sera en tournée la saison prochaine et parmi les lieux magnifiques que nous visiterons, il y a l'Opéra de Paris et l'Opéra de St-Étienne. Nous savons que nous allons danser le spectacle en France, en Belgique, en Hollande et en Suède... nous aurons également la chance de donner plusieurs représentations dans différentes régions du Québec, ce qui est toujours un privilège. » Pour plus de détails, visitez le site web de la compagnie. https://www.caspublic.org/francais/spectacles/9/
Si vous suivez l’actualité, l’année 2016 a dû parfois vous démoraliser. Notre planète et la race humaine semblent être très malades. Pour Hélène Blackburn, ce n’est pas une raison pour se laisser abattre. Elle décide plutôt de célébrer ce qu’il y a de beau sur terre : « 9 est un spectacle plein d'énergie et d'espoir. La 9ieme de Beethoven se concluant sur l'Hymne à la Joie, je pense qu'on peut difficilement résister à cet appel au dépassement et au bonheur. C'est une œuvre intense, au moins aussi intense et passionnée que la musique de Beethoven. Je crois qu'en ces temps troublent où les mauvaises nouvelles semblent trop souvent obscurcir l'horizon, le choix de travailler sur un hommage à nos différences est quelque chose qui fait un bien infini autant pour nous que pour les spectateurs. »
Pour conclure, la fondatrice de Cas Public nous partage ce qui suivra pour sa compagnie suite à la série de représentations de 9 : « Après la PDA, nous retournons en Europe pour deux blocs de tournée importants qui vont nous amener en France, en Espagne et au Royaume-Uni. Nous allons danser trois œuvres du répertoire dont "9". Dans les faits, nous serons en tournée jusqu'au début du mois de juin avec un petit retour de 2 semaines à Montréal en avril. "9" sera en tournée la saison prochaine et parmi les lieux magnifiques que nous visiterons, il y a l'Opéra de Paris et l'Opéra de St-Étienne. Nous savons que nous allons danser le spectacle en France, en Belgique, en Hollande et en Suède... nous aurons également la chance de donner plusieurs représentations dans différentes régions du Québec, ce qui est toujours un privilège. » Pour plus de détails, visitez le site web de la compagnie. https://www.caspublic.org/francais/spectacles/9/
9 - Cas Public from Cas Public on Vimeo.