Le hip hop contemporain prend d'assaut le Théâtre Maisonneuve
13 avril 2012
Critique des spectacles Correira et Agwa de la Compagnie Käfig.
- Oliver Koomsatira
Le diffuseur Danse Danse termine la saison 2011-2012 avec une véritable célébration digne de sa renommée. Le programme double de la compagnie Käfig a porté la soirée à un summum d'énergie électrifiant au Théâtre Maisonneuve. Qu'est-ce que la compagnie Käfig? Essentiellement, c'est le laboratoire chorégraphique de Mourad Merzouki. La grande particularité de la compagnie basée en France, si on la compare à l'ensemble de la danse subventionnée au Québec, c'est qu'elle est principalement conçue à partir de hip hop, de breakdance et d'acrobatie, traduisant ainsi une gestuelle très différente de la majorité des oeuvres de danse contemporaine retrouvées ici.
Et comment se porte la compagnie depuis sa fondation en 1996 ? 17 créations ont déjà été présentées plus de 2000 fois dans 47 pays devant plus d'un million de spectateurs ! On ne se plaint pas… Est-ce que le mouvement s'essouffle aujourd'hui ? Cinq de leurs spectacles sont actuellement en tournée simultanément… Pas pire du tout pour un créateur qui oeuvre dans la fusion de hip hop et de contemporain. Normalement, la gestuelle retrouvée dans les spectacles Correira et Agwa, qui a visiblement charmé le public de Danse Danse, ne se retrouve que dans les vidéoclips RnB de Usher ou dans les tournées hyper-commerciales de Justin Bieber, ou bien encore dans les méga-compétitions internationales de breakdance. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles les artistes de hip hop sont découragés de la réponse qu'ils reçoivent des conseils des arts. Comme les styles hip hop et breakdance purs se retrouvent principalement dans le monde commercial, il est impossible d'être subventionné de la même façon que les compagnie de danse contemporaine ou classique. Le résultat est que nos artistes urbains partent pour les États-Unis à la recherche de compétitions d'envergures ainsi que des spectacles de Madonna et Janet Jackson. C'est d'ailleurs surprenant que Danse Danse ait décidé d'inclure ce type de spectacle dans sa programmation. Ça prouve décidément qu'ils poussent l'ouverture à la diversité au-delà des limites conventionnelles.
Ont-ils fait un bon choix en invitant ces 11 jeunes danseurs acrobatiques, ou acrobates qui dansent ? Avec une ovation enjouée combinée aux plusieurs rappels énergiques incorporant une multitude de lignes acrobatiques et de séquences de breakdance pendant que la salle claquait des mains au rythme de la chanson, Danse Danse peut-être très satisfait. L'énergie était palpable. Dans les deux oeuvres de la soirée, on voit tout-de-suite ce qui intéresse le chorégraphe Mourad Merzouki : les acrobaties vertigineuses, les passes de breakdance époustouflantes et les séquences de hip hop déferlant à une vitesse fulgurante. Quoique les deux oeuvres aient des thématiques différentes ; Correira les jeunes hommes en bicyclette, Agwa la source de vie de la plupart du commun des mortels : l'eau, le style du mouvement préserve tout-de-même une esthétique semblable au niveau de l'énergie inépuisable coulant à travers plusieurs sections synchronisées de groupes, travail de partenaire acrobatique ingénieux, et concepts d'images originaux.
En somme, une des grandes forces du spectacle est sans doute le charisme des jeunes danseurs. À l'opposé de la plupart des visages que l'on retrouve en danse contemporaine, ceux de ces jeunes fringants étaient animés et souriants, transmettant automatiquement leur joie de la danse au public. On se gratte la tête en ce moment face au fléau des gangs de rue, de vente de drogue et de proxénétisme chez les adolescents. Qu'est-ce qui se passe avec nos jeunes ? Sont-ils devenus déficients ? Sûrement pas, il faut être très rusé pour ne pas se faire prendre par la police, être fort physiquement pour être capable de casser la gueule de nos rivaux, être courageux pour faire des transactions avec la mafia, être bon en mathématique pour calculer nos profits et réinvestir dans notre marchandise illicite, être travaillant pour assurer sa suprématie dans les territoires convoités par les autres entrepreneurs de la rue, etc.
Nos jeunes pourraient peut-être recevoir la piqûre de la danse à la place comme ces 11 vaillants représentants Käfig de la génération Y. Comme les gangsters, ils sont rusés pour comprendre et exécuter les séquences complexes du chorégraphe, forts pour se propulser très haut dans les airs, courageux pour tourner sur la tête sans se casser le cou, bons en mathématique pour calculer les comptes à un rythme effréné, et certes très travaillants pour être capables de subir les conséquences de la tournée internationale. Voilà, ils ne sont pas déficients nos jeunes, ils sont juste mal guidés. Mettons plus d'argent dans la prévention à travers les arts et moins dans les prisons. Comme ça on aura plus d'artistes et de spectacles et moins de vols à main armée. Je préfère nettement voir ces 11 athlètes sous la gouverne d'un Mourad Merzouki qu'un mafiosi ambitieux. Pour plus de détails sur le programme double offert par Danse Danse qui prend fin samedi, visitez le site web. http://www.dansedanse.net/archives/pages_archives/1112_kafig.html
Extraits du spectacle.
Et comment se porte la compagnie depuis sa fondation en 1996 ? 17 créations ont déjà été présentées plus de 2000 fois dans 47 pays devant plus d'un million de spectateurs ! On ne se plaint pas… Est-ce que le mouvement s'essouffle aujourd'hui ? Cinq de leurs spectacles sont actuellement en tournée simultanément… Pas pire du tout pour un créateur qui oeuvre dans la fusion de hip hop et de contemporain. Normalement, la gestuelle retrouvée dans les spectacles Correira et Agwa, qui a visiblement charmé le public de Danse Danse, ne se retrouve que dans les vidéoclips RnB de Usher ou dans les tournées hyper-commerciales de Justin Bieber, ou bien encore dans les méga-compétitions internationales de breakdance. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles les artistes de hip hop sont découragés de la réponse qu'ils reçoivent des conseils des arts. Comme les styles hip hop et breakdance purs se retrouvent principalement dans le monde commercial, il est impossible d'être subventionné de la même façon que les compagnie de danse contemporaine ou classique. Le résultat est que nos artistes urbains partent pour les États-Unis à la recherche de compétitions d'envergures ainsi que des spectacles de Madonna et Janet Jackson. C'est d'ailleurs surprenant que Danse Danse ait décidé d'inclure ce type de spectacle dans sa programmation. Ça prouve décidément qu'ils poussent l'ouverture à la diversité au-delà des limites conventionnelles.
Ont-ils fait un bon choix en invitant ces 11 jeunes danseurs acrobatiques, ou acrobates qui dansent ? Avec une ovation enjouée combinée aux plusieurs rappels énergiques incorporant une multitude de lignes acrobatiques et de séquences de breakdance pendant que la salle claquait des mains au rythme de la chanson, Danse Danse peut-être très satisfait. L'énergie était palpable. Dans les deux oeuvres de la soirée, on voit tout-de-suite ce qui intéresse le chorégraphe Mourad Merzouki : les acrobaties vertigineuses, les passes de breakdance époustouflantes et les séquences de hip hop déferlant à une vitesse fulgurante. Quoique les deux oeuvres aient des thématiques différentes ; Correira les jeunes hommes en bicyclette, Agwa la source de vie de la plupart du commun des mortels : l'eau, le style du mouvement préserve tout-de-même une esthétique semblable au niveau de l'énergie inépuisable coulant à travers plusieurs sections synchronisées de groupes, travail de partenaire acrobatique ingénieux, et concepts d'images originaux.
En somme, une des grandes forces du spectacle est sans doute le charisme des jeunes danseurs. À l'opposé de la plupart des visages que l'on retrouve en danse contemporaine, ceux de ces jeunes fringants étaient animés et souriants, transmettant automatiquement leur joie de la danse au public. On se gratte la tête en ce moment face au fléau des gangs de rue, de vente de drogue et de proxénétisme chez les adolescents. Qu'est-ce qui se passe avec nos jeunes ? Sont-ils devenus déficients ? Sûrement pas, il faut être très rusé pour ne pas se faire prendre par la police, être fort physiquement pour être capable de casser la gueule de nos rivaux, être courageux pour faire des transactions avec la mafia, être bon en mathématique pour calculer nos profits et réinvestir dans notre marchandise illicite, être travaillant pour assurer sa suprématie dans les territoires convoités par les autres entrepreneurs de la rue, etc.
Nos jeunes pourraient peut-être recevoir la piqûre de la danse à la place comme ces 11 vaillants représentants Käfig de la génération Y. Comme les gangsters, ils sont rusés pour comprendre et exécuter les séquences complexes du chorégraphe, forts pour se propulser très haut dans les airs, courageux pour tourner sur la tête sans se casser le cou, bons en mathématique pour calculer les comptes à un rythme effréné, et certes très travaillants pour être capables de subir les conséquences de la tournée internationale. Voilà, ils ne sont pas déficients nos jeunes, ils sont juste mal guidés. Mettons plus d'argent dans la prévention à travers les arts et moins dans les prisons. Comme ça on aura plus d'artistes et de spectacles et moins de vols à main armée. Je préfère nettement voir ces 11 athlètes sous la gouverne d'un Mourad Merzouki qu'un mafiosi ambitieux. Pour plus de détails sur le programme double offert par Danse Danse qui prend fin samedi, visitez le site web. http://www.dansedanse.net/archives/pages_archives/1112_kafig.html
Extraits du spectacle.