Les rites de passage africains dans une église catholique.
13 décembre 2011
Critique de Nyau de Gibson Muriva.
-Oliver Koomsatira
Photo du spectacle «Nyau» de Gibson Muriva.
Dans la plupart des sociétés ancestrales, les jeunes passaient à travers des rituels d'initiation afin de pouvoir être considérés comme des adultes. De nos jours, ce passage n'est plus vraiment souligné par les familles ou les communautés mais est plutôt imposé par les contraintes financières qu'engendrent l'âge adulte. Plus de maman et de papa pour subvenir à mes besoins donc je dois apprendre à gagner ma vie tout seul. Je dois payer un loyer ou une hypothèque, je dois payer pour l'eau chaude, l'électricité, le chauffage, le téléphone, l'épicerie, la taxe de mutation, la taxe municipale, la taxe scolaire, l'assurance de biens, l'assurance de responsabilité civile, je dois rembourser ma carte de crédit, je dois mettre de l'argent de côté dans un RÉER, dans des fonds mutuels, je dois faire mon rapport d'impôt, je dois m'acheter une voiture ou une passe d'autobus, je dois payer pour le changement d'huile, l'entretien mécanique, je dois, je dois, je dois. Facile de perdre le fil et de s'égarer dans ce fabuleux monde moderne capitaliste rempli de fraudeurs. Donc, si je suis capable de survivre financièrement, je suis supposé être un adulte responsable. N'est-ce pas?
La société secrète de Chewas, qui est basée dans le Sud de l'Afrique, organise des rituels d'initiation qu'on appelle Nyau. Légèrement différent à notre rite d'initiation financier, celui des Chewas inclus la circoncision pour le garçon et l'excision pour la fille… pour ceux qui ne savent pas ce qu'est l'excision, faites une petite recherche, je vais vous épargner l'esprit d'images quelques peu troublantes. Âmes sensibles, prière de s'abstenir, vous risquez de faire des cauchemars. Gibson Muriva s'est donc inspiré de cette thématique de transition pour sa plus récente œuvre chorégraphique intitulé Nyau. Lui-même né au Zymbabwe, il transmet toute une richesse et un bagage culturel à notre sol québécois. Ce sol qui est d'ailleurs l'héritage sacré de nos hôtes amérindiens, quelque peu ébranlés par la colonisation et l'assimilation européenne qui donna naissance aux nouveaux «propriétaires», c'est-à-dire nous… C'est-à-dire pour l'instant.
Appuyé par cinq danseuses, Gibson Muriva a présenté un spectacle unique et puissant à la communauté montréalaise. Jusqu'à preuve du contraire, vous ne risquez pas de voir quelque chose de semblable en ce moment. Baignée dans la trame sonore qui nous a transportée au continent de l'Afrique, la pièce Nyau s'est déployée avec la force de la culture africaine synthétisée par ces interprètes venus de partout sur la planète. Tel un chaman ou un chef de tribu, Gibson Muriva a rempli l'église du Gesù avec une authenticité et une présence inébranlable. Cette église grandiose, qui possède un orgue géant, des peintures archaïques de Jésus ainsi qu'un plafond d'une centaine de pieds de hauteur a d'ailleurs amplifié le message du chorégraphe: «Se conformer est un choix. Dans chacune des situations nous mesurons l'importance du choix par le prix à payer.» Le choix des personnages africains de se conformer ou non à ce rituel douloureux côtoyait ainsi l'histoire de notre peuple qui s'est récemment libéré de l'emprise religieuse qui régnait au Québec. Le contexte est différent mais l'évolution humaine est la même: chaque génération se rebelle contre ses traditions désuètes et vides de sens afin de se créer une nouvelle religion à l'image de ses valeurs contemporaines. Comme les personnages de Nyau, le prix est parfois de se faire exiler vers un monde qu'on ne connait pas, nous laissant donc seul et sans communauté. Seul avec ses principes ou entouré avec des transgressions à notre intégrité? Le choix est le nôtre.
Ayant débuté son parcours en tant que chorégraphe lors des soirées Danses Buisonnières en 2008 ainsi qu'avec le conseil des arts de Montréal en 2009, Gibson Muriva semble être doté d'un talent inné pour la création. Son choix de propos lui est propre et intime, lui donnant ainsi une confiance fortifiée en tant qu'interprète et chef d'orchestre. Sa construction chorégraphique est très bien équilibrée, soigneusement rythmée, théâtralisée et infusée d'une raison d'être profonde qui donne une dimension puissante à ses interprètes. Avec une œuvre d'une telle qualité et unicité, il ne serait pas surprenant que vous entendiez encore parler de ce jeune chorégraphe dans les années à venir. Pour plus de détails sur Nyau, visitez le site web de la compagnie. www.murivadance.com
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La société secrète de Chewas, qui est basée dans le Sud de l'Afrique, organise des rituels d'initiation qu'on appelle Nyau. Légèrement différent à notre rite d'initiation financier, celui des Chewas inclus la circoncision pour le garçon et l'excision pour la fille… pour ceux qui ne savent pas ce qu'est l'excision, faites une petite recherche, je vais vous épargner l'esprit d'images quelques peu troublantes. Âmes sensibles, prière de s'abstenir, vous risquez de faire des cauchemars. Gibson Muriva s'est donc inspiré de cette thématique de transition pour sa plus récente œuvre chorégraphique intitulé Nyau. Lui-même né au Zymbabwe, il transmet toute une richesse et un bagage culturel à notre sol québécois. Ce sol qui est d'ailleurs l'héritage sacré de nos hôtes amérindiens, quelque peu ébranlés par la colonisation et l'assimilation européenne qui donna naissance aux nouveaux «propriétaires», c'est-à-dire nous… C'est-à-dire pour l'instant.
Appuyé par cinq danseuses, Gibson Muriva a présenté un spectacle unique et puissant à la communauté montréalaise. Jusqu'à preuve du contraire, vous ne risquez pas de voir quelque chose de semblable en ce moment. Baignée dans la trame sonore qui nous a transportée au continent de l'Afrique, la pièce Nyau s'est déployée avec la force de la culture africaine synthétisée par ces interprètes venus de partout sur la planète. Tel un chaman ou un chef de tribu, Gibson Muriva a rempli l'église du Gesù avec une authenticité et une présence inébranlable. Cette église grandiose, qui possède un orgue géant, des peintures archaïques de Jésus ainsi qu'un plafond d'une centaine de pieds de hauteur a d'ailleurs amplifié le message du chorégraphe: «Se conformer est un choix. Dans chacune des situations nous mesurons l'importance du choix par le prix à payer.» Le choix des personnages africains de se conformer ou non à ce rituel douloureux côtoyait ainsi l'histoire de notre peuple qui s'est récemment libéré de l'emprise religieuse qui régnait au Québec. Le contexte est différent mais l'évolution humaine est la même: chaque génération se rebelle contre ses traditions désuètes et vides de sens afin de se créer une nouvelle religion à l'image de ses valeurs contemporaines. Comme les personnages de Nyau, le prix est parfois de se faire exiler vers un monde qu'on ne connait pas, nous laissant donc seul et sans communauté. Seul avec ses principes ou entouré avec des transgressions à notre intégrité? Le choix est le nôtre.
Ayant débuté son parcours en tant que chorégraphe lors des soirées Danses Buisonnières en 2008 ainsi qu'avec le conseil des arts de Montréal en 2009, Gibson Muriva semble être doté d'un talent inné pour la création. Son choix de propos lui est propre et intime, lui donnant ainsi une confiance fortifiée en tant qu'interprète et chef d'orchestre. Sa construction chorégraphique est très bien équilibrée, soigneusement rythmée, théâtralisée et infusée d'une raison d'être profonde qui donne une dimension puissante à ses interprètes. Avec une œuvre d'une telle qualité et unicité, il ne serait pas surprenant que vous entendiez encore parler de ce jeune chorégraphe dans les années à venir. Pour plus de détails sur Nyau, visitez le site web de la compagnie. www.murivadance.com
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