Un Marc Boivin aux multiples visages
27 octobre 2012
Critique du spectacle Une idée sinon vraie... de Marc Boivin / Ana Sokolovic & Quatuor Bozzini.
- Oliver Koomsatira

Marc Boivin et Le Quatuor Bozzini (Mira Benjamin, Isabelle Bozzini, Stéphanie Bozzini, Clemens Merkel) dans « Une idée sinon vraie... »
Crédits : Michael Slobodian.
L'Agora de la danse existe depuis plus de 20 ans maintenant et il est certain que sa réputation n'est plus remise en question aux yeux de la communauté de la danse contemporaine montréalaise. Vous savez, en temps normal un diffuseur garde un but majeur en tête : vendre beaucoup de billets en prenant le moins de risque possible, ce qui explique pourquoi la plupart des diffuseurs ne présentent pas ou très peu de danse au Québec. Mieux vaut programmer des têtes d'affiches et beaucoup d'humoristes. Ça, ça comble des salles. Par contre, l'Agora de la danse se distingue en étant aussi « un lieu de création, de soutien à l'expérimentation, et d'encouragement à l'innovation ». Je sais, je sais, vous n'aimez pas entendre le mot expérimentation quand vient temps de sortir votre porte-feuille, ça ne fait pas très vendeur. Par contre, côté culturel, si personne ne prend jamais de risques pour s'aventurer loin des sentiers battus, on risque de toujours reproduire les mêmes spectacles, ce qui voudrait dire qu'on serait encore bloqué au ballet classique ou à la danse moderne si les créateurs québécois n'avaient pas de plateformes comme celle-ci pour prendre des risques. Ça me semble une idée sinon vraie ce que j'avance…
La collaboration entre l'instigatrice du projet Ana Sokolovic (la compositrice), le danseur/chorégraphe Marc Boivin ainsi que le Quatuor Bozzini semble être une de ces expérimentations qui ne se voient pas régulièrement sur scène à Montréal. La plupart du temps, la musique est enregistrée au lieu d'être jouée live dans les spectacles de danse. C'est rare de voir les musiciens sur scène avec les interprètes. Ce qui est encore plus rare, c'est de faire bouger les musiciens sur scène un peu comme si ceux-ci participaient aussi à la chorégraphie. Si vous voulez pousser la recherche encore plus loin, vous pouvez même faire comme Marc Boivin et prendre une violoniste dans vos bras pendant qu'elle joue. Ou bien tomber en amour avec elle comme les amoureux trop innocents de la Commedia dell'arte savent si bien le faire. Ah, qu'ils souffrent ces âmes romantiques, la flèche de Cupidon transperçant leur aorte et leur faisant cracher des caillots de sang poétiques.
En gros, pour saisir Une idée sinon vraie…, il est utile d'en savoir un peu sur cette forme qu'est la Commedia dell'arte. Il est d'ailleurs impossible de bien comprendre l'histoire du théâtre sans passer par là. En « crash course » très condensé, on peut dire que la Commedia dell'arte a ceci comme particularité : c'est une structure dans laquelle les personnages sont récurrents. C'est-à-dire qu'au lieu d'avoir la liberté complète d'une pièce à l'autre, il y a toujours ces archétypes qui reviennent comme le Docteur qui est pas mal toujours imbécile, le Capitan dont la fierté n'a aucune limite, Pantalone qui est définitivement le Shylock le plus « cheap » que vous puissiez croiser. Bref, des personnages précis reviennent toujours d'une pièce à l'autre et ce n'est que le contexte de l'histoire qui change. C'est ainsi que Marc Boivin a changé de peau tout au long de la pièce pour nous offrir son interprétation de l'essence de ces personnages.
À l'aide des costumes sublimes d'Angelo Barsetti et d'un Quatuor talentueux, Marc Boivin c'est lancé dans cette recherche où la précision comique de la Commedia et la forme abstraite de son style de danse s'entrechoquent. Le spectacle est loin d'être centré sur la comédie physique comme l'est traditionnellement la Commedia dell'arte, il est plutôt abstrait et mystérieux, comme si nous faisions face à un fantôme prit dans une dimension entre la vie et la mort qui tentait de se divertir à travers ses souvenirs lointains d'une pièce de théâtre. Une idée sinon vraie… nous affecte surtout à travers ses images puissantes, la présence lugubre de ses interprètes ainsi que par sa musique déroutante. Votre subconscient est imprégné d'images qui vous restent en tête jusqu'au couché. Pour plus de détails, visitez le site web de l'Agora de la danse.
http://www.agoradanse.com/fr/spectacles/2012/une-idee-sinon-vraie
Prochain rendez-vous avec Anne Plamondon du 7 au 9 novembre.
http://www.agoradanse.com/fr/spectacles/2012/les-memes-yeux-que-toi
Voici des extraits du spectacle Une idée sinon vraie...
La collaboration entre l'instigatrice du projet Ana Sokolovic (la compositrice), le danseur/chorégraphe Marc Boivin ainsi que le Quatuor Bozzini semble être une de ces expérimentations qui ne se voient pas régulièrement sur scène à Montréal. La plupart du temps, la musique est enregistrée au lieu d'être jouée live dans les spectacles de danse. C'est rare de voir les musiciens sur scène avec les interprètes. Ce qui est encore plus rare, c'est de faire bouger les musiciens sur scène un peu comme si ceux-ci participaient aussi à la chorégraphie. Si vous voulez pousser la recherche encore plus loin, vous pouvez même faire comme Marc Boivin et prendre une violoniste dans vos bras pendant qu'elle joue. Ou bien tomber en amour avec elle comme les amoureux trop innocents de la Commedia dell'arte savent si bien le faire. Ah, qu'ils souffrent ces âmes romantiques, la flèche de Cupidon transperçant leur aorte et leur faisant cracher des caillots de sang poétiques.
En gros, pour saisir Une idée sinon vraie…, il est utile d'en savoir un peu sur cette forme qu'est la Commedia dell'arte. Il est d'ailleurs impossible de bien comprendre l'histoire du théâtre sans passer par là. En « crash course » très condensé, on peut dire que la Commedia dell'arte a ceci comme particularité : c'est une structure dans laquelle les personnages sont récurrents. C'est-à-dire qu'au lieu d'avoir la liberté complète d'une pièce à l'autre, il y a toujours ces archétypes qui reviennent comme le Docteur qui est pas mal toujours imbécile, le Capitan dont la fierté n'a aucune limite, Pantalone qui est définitivement le Shylock le plus « cheap » que vous puissiez croiser. Bref, des personnages précis reviennent toujours d'une pièce à l'autre et ce n'est que le contexte de l'histoire qui change. C'est ainsi que Marc Boivin a changé de peau tout au long de la pièce pour nous offrir son interprétation de l'essence de ces personnages.
À l'aide des costumes sublimes d'Angelo Barsetti et d'un Quatuor talentueux, Marc Boivin c'est lancé dans cette recherche où la précision comique de la Commedia et la forme abstraite de son style de danse s'entrechoquent. Le spectacle est loin d'être centré sur la comédie physique comme l'est traditionnellement la Commedia dell'arte, il est plutôt abstrait et mystérieux, comme si nous faisions face à un fantôme prit dans une dimension entre la vie et la mort qui tentait de se divertir à travers ses souvenirs lointains d'une pièce de théâtre. Une idée sinon vraie… nous affecte surtout à travers ses images puissantes, la présence lugubre de ses interprètes ainsi que par sa musique déroutante. Votre subconscient est imprégné d'images qui vous restent en tête jusqu'au couché. Pour plus de détails, visitez le site web de l'Agora de la danse.
http://www.agoradanse.com/fr/spectacles/2012/une-idee-sinon-vraie
Prochain rendez-vous avec Anne Plamondon du 7 au 9 novembre.
http://www.agoradanse.com/fr/spectacles/2012/les-memes-yeux-que-toi
Voici des extraits du spectacle Une idée sinon vraie...